L’art du baiser
Calfeutrés chez nous à cause du virus, nous sommes obligés de prendre notre mal en patience et d’attendre sagement que la crise sanitaire passe. Mais rien ne nous empêche d’imaginer, de nous laisser inspirer par l’art du baiser. De l’inspiration à la pratique, il n’y a pas loin…
Baiser de Street Art
C 215
« Un baiser légal ne vaut jamais un baiser volé. »
Guy de Maupassant (1850 – 1893)
Anonyme
Jacques Prévert
Des milliers et des milliers d’années
Ne sauraient suffire
Pour dire
La petite seconde d’éternité
Où tu m’as embrassé
Où je t’ai embrassée
Un matin dans la lumière de l’hiver
Au parc Montsouris à Paris
À Paris
Sur la terre
La terre qui est un astre.
Jacques Prévert, Le jardin, Paroles
Baiser de graphiste
Efix
Montaigne
« Parce que c’était lui ; parce que c’était moi »
« À notre première rencontre, qui fut par hasard en une grande fête et compagnie de ville, nous nous trouvâmes si pris, si connus, si obligés entre nous, que rien dès lors ne nous fut si proche que l’un à l’autre » (Montaigne à propos de La Boétie)
Baiser de BD
Baiser de Calvin et Hobbes
Marie Desplechin
On n’échappe à la solitude que par à-coups. Et l’amitié fabrique des à-coups. J’aime l’amitié. Elle a le goût de cette bouffée d’air que les tortionnaires laissent prendre à leur victime avant de lui replonger la tête dans l’eau. Je ne remets pas en cause la valeur du souffle. Ce qui me tue, c’est que le reste du temps on étouffe.
Notez bien, l’amitié n’est pas la seule à nous tirer momentanément le nez hors de la baignoire. Il y a surtout l’amour.
Tout cela donne le sentiment grisant d’échapper à la noyade. Un instant. Les gens appellent ça le bonheur. Moi aussi. Avec réserve.
Marie Desplechin – Trop sensibles
Baiser de J-M Rochette
Verlaine
En dépit des sots et des méchants
N’est-ce pas ? En dépit des sots et des méchants
Qui ne manqueront pas d’envier notre joie,
Nous serons fiers parfois et toujours indulgents.
N’est-ce pas ? Nous irons, gais et lents, dans la voie
Modeste que nous montre en souriant l’Espoir,
Peu soucieux qu’on nous ignore ou qu’on nous voie.
Isolés dans l’amour ainsi qu’en un bois noir,
Nos deux cœurs, exhalant leur tendresse paisible,
Seront deux rossignols qui chantent dans le soir.
Quant au Monde, qu’il soit envers nous irascible
Ou doux, que nous feront ses gestes ? Il peut bien,
S’il veut, nous caresser ou nous prendre pour cible.
Unis par le plus fort et le plus cher lien,
Et d’ailleurs, possédant l’armure adamantine,
Nous sourirons à tous et n’aurons peur de rien.
Sans nous préoccuper de ce que nous destine
Le Sort, nous marcherons pourtant du même pas,
Et la main dans la main, avec l’âme enfantine
De ceux qui s’aiment sans mélange, n’est-ce pas ?
Verlaine – La bonne chanson (1872)
Baiser de Snoopy
« Ma chérie,
Je pense à toi sans cesse,
Je pense à toi sans cesse à peu près une fois tous les quinze jours. »
(Snoopy prend de la hauteur de Charles Monroe Schulz)
Baiser de Dysney
Baiser de cinéma
Le Kid
Dans Le Kid, Charlie Chaplin met en scène une merveilleuse relation fusionnelle empêchée entre le vagabond, devenu père adoptif, et un petit garçon dont on va le séparer. La scène d’arrachement au moment où arrivent les travailleurs sociaux est inoubliable avec au final un baiser de père à son enfant absolu et déchirant. (allociné)
Rudyard Kipling
Si
Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou perdre en un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;
Si tu peux être amant sans être fou d’amour,
Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre,
Et, te sentant haï, sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;
Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles
Sans mentir toi-même d’un mot ;
Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois,
Et si tu peux aimer tous tes amis en frères,
Sans qu’aucun d’eux soit tout pour toi ;
Si tu sais méditer, observer et connaître,
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n’être que penseur ;
Si tu sais être dur, sans jamais être en rage,
Si tu sais être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage,
Sans être moral et pédant ;
Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,
Alors les Rois les Dieux la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis,
Et, ce qui vaut bien mieux que les Rois et la Gloire,
Tu seras un homme mon fils !
Traduction : André Maurois (1918)
« Known unto God »
Rudyard Kipling a écrit ce poème à l’attention de son unique fils, John, âgé alors de 13 ans en 1910.
Ce dernier meurt lors de son premier assaut, à la bataille de Loos en 1915. Son corps ne fut pas retrouvé. Jusqu’à sa mort en 1936, Rudyard Kipling procéda à des fouilles dans la région pour retrouver les preuves de sa mort ou sa dépouille.
Il rédigea l’inscription qui figure sur la tombe des soldats inconnus britanniques : « Known unto God » (Connu seul de Dieu). En 1991, la tombe du lieutenant John Kipling fut enfin identifiée de manière concluante.
À Bout De Souffle
Baiser de photographe
Robert Doisneau
Jacques Prévert
Les enfants qui s’aiment
Les enfants qui s’aiment s’embrassent debout
Contre les portes de la nuit
Et les passants qui passent les désignent du doigt
Mais les enfants qui s’aiment
Ne sont là pour personne
Et c’est seulement leur ombre
Qui tremble dans la nuit
Excitant la rage des passants
Leur rage, leur mépris, leurs rires et leur envie
Les enfants qui s’aiment ne sont là pour personne
Ils sont ailleurs bien plus loin que la nuit
Bien plus haut que le jour
Dans l’éblouissante clarté de leur premier amour.
Jacques Prévert – Le jardin – Spectacle (1951)
Baiser de peintre
Edwige
Je suis devant toi pour te donner toutes les étoiles du ciel en un baiser sur les yeux.
Paul Éluard – L’Immaculée Conception (1930)
Annie
« Je suis en faveur de la coutume qui veut qu’un homme baise la main d’une femme la première fois qu’il la voit. Il faut bien commencer par un endroit quelconque. »
Elles et Toi – Sacha Guitry
Magritte
« Car enfin, quand on n’a plus personne à embrasser (…) la vie doit être triste. »
Françoise Sagan – Toxique (le livre de poche)
Paul Éluard
Couvre-feu
Que voulez-vous la porte était gardée
Que voulez-vous nous étions enfermés
Que voulez-vous la rue était barrée
Que voulez-vous la ville était matée
Que voulez-vous elle était affamée
Que voulez-vous nous étions désarmés
Que voulez-vous la nuit était tombée
Que voulez-vous nous nous sommes aimés.
Paul Éluard, Recueil : « Poésie et vérité »
Baiser d’illustrateur
Gustave Doré
Tu quoque mi fili
Jules César
Baiser de sculpteur
Rodin
Edmond Ronstand
Un baiser, mais à tout prendre, qu’est-ce?
Un serment fait d’un peu plus près, une promesse
Plus précise, un aveu qui se veut confirmer,
Un point rose qu’on met sur l’i du verbe aimer;
C’est un secret qui prend la bouche pour oreille,
Un instant d’infini qui fait un bruit d’abeille,
Une communion ayant un goût de fleur,
Une façon d’un peu se respirer le cœur,
Et d’un peu se goûter , au bord des lèvres , l’âme!
Edmond Ronstand – Cyrano de Bergerac
La playlist
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Sources
- site officiel de René Magritte https://magritte.brussels/index.php/portfolio/les-amants/
- Site officiel de C215 www.C215.fr
- Français mon amour http://lefrancaismonamour2013.blogspot.com/2016/11/les-enfants-qui-saiment-de-jacques.html
- Site web d’EFIX : https://www.efix.fr/
Le baiser sur le blog de Marie-Anne
- Le baiser de Klimt
- Le baiser de Rodin
- Le baiser de C215
- L’art du baiser
- Le baiser du prince charmant
- Big Bisous (Carlos & Family)
- Ça s’est un baiser de Philippe Djian
- Quand la bise fut venue…
- Jérôme Attal, Petit éloge du baiser
Un livre pour s’embrasser…
Petit éloge du baiser de Jérôme Attal
Jérôme Attal est parolier, scénariste et auteur d’une vingtaine d’ouvrages dont le Petit éloge du baiser : un essai littéraire, sans prise de tête, à la fois tendre, amusant et élégant. Paru en octobre 2021, aux éditions Les Pérégrines, cet ouvrage a une particularité tout à fait remarquable : son titre donne tout de suite envie…
« Partons, dans un baiser, pour un monde inconnu. » (Alfred de Musset)